Début du procès d’IKEA dans une affaire d’espionnage de salariés
La filiale française est accusée de s'être illégalement renseignée sur certains de ses salariés par l'entremise de policiers.
C’est aujourd’hui que s’ouvre, devant le tribunal correctionnel de Versailles (Yvelines), le procès de la filiale française d’Ikea, laquelle est poursuivie en tant que personne morale. L’affaire avait été révélée en 2012 par Mediapart et Le Canard Enchaîné. D’anciens hauts responsables, mais aussi des policiers ainsi que le patron d’une société privée de surveillance sont accusés d’avoir espionné des salariés. Après une plainte du syndicat FO, l’instruction avait révélé, selon les termes du parquet, un “système d’espionnage” d’employés mais également de candidats à l’embauche. 74 personnes se sont porté parties civiles.
Jusqu’à 3,7 millions d’euros d’amende
D’après l’accusation, des centaines de personnes dont des syndicalistes ont ainsi été passées au crible, leurs antécédents judiciaires ou leur train de vie analysés à la loupe. Mais des avocats de la défense estiment quant à eux que l’enquête montre de nombreuses faiblesses. Ainsi Me Olivier Baratelli, avocat de l’ancienne DRH Claire Héry, a déclaré qu’il plaiderait la nullité du dossier, dénonçant une “fable montée de toutes pièces par des syndicats”. Quinze personnes physiques sont jugées, dont des directeurs de magasins, des fonctionnaires de police mais aussi l’ex-PDG Stefan Vanoverbeke (en poste de 2010 à 2015) ainsi que son prédécesseur Jean-Louis Baillot. IKEA France encourt jusqu’à 3,75 millions d’euros d’amende, et certains prévenus dix années de prison.
Un système “largement répandu”
Le parquet avait dans ses réquisition estimé que la société avait “bien mis en place un système, sous couvert de sa direction de gestion des risques, visant à obtenir des renseignements sur les candidats à l’embauche et certains collaborateurs, renseignements tirés pour partie de la consultation des fichiers police/gendarmerie”. Ce “système, largement répandu” était “non seulement connu des dirigeants de la société” mais “surtout utilisé à grande échelle, notamment lors de l’ouverture de nouveaux magasins”. Un rapport, que l’AFP avait consulté en 2018, détaillait des éléments de la vie personnelle de certains employés, leurs amitiés et soutiens au sein de l’entreprise, et la manière envisagée pour retourner ces soutiens. Jeudi dernier, IKEA Frace a assuré que “la conformité, la transparence et l’éthique” étaient “prioritaires” pour elle et que ces valeurs “guident l’ensemble de [ses] actions tous les jours”.