Participation et enjeux du vote au second tour des municipales de 2020 : Vers un réel « déconfinement électoral » ?
À l’occasion de l’ouverture de la campagne officielle pour le second tour des élections municipales (15 juin), Directs.fr a commandé à l'Ifop une vaste enquête qui annonce un niveau record d'abstention le 28 juin prochain.
Une vaste enquête (3.018 Français dont 1.167 dans les communes concernées par le 2ème tour) réalisé avec l’Ifop pour Directs.fr
Alors que l’abstention a été massive au 1er tour, quelle va être l’ampleur de la mobilisation électorale au second tour des élections municipales fixée au 28 Juin ?
Dans un contexte exceptionnel où le second tour aura lieu près de trois mois après le premier dans des conditions n’offrant pas aux élus le temps et les moyens de faire vraiment campagne, il n’est pas surprenant que nos prévisions annoncent un niveau de participation historiquement bas : seuls 38% des électeurs inscrits dans les communes non pourvues au 1er tour déclarent avoir l’intention d’aller voter au second, soit un taux exceptionnellement faible pour une élection municipale. À titre de comparaison, le taux de participation au 2nd tour en 2014 était de 61,7% dans les communes encore concernées par les élections. Selon cette estimation, la mobilisation des 16 millions d’électeurs appelés à voter le 28 juin devrait donc être plus faible qu’au premier tour où elle avait déjà pourtant été exceptionnellement faible (44,5% dans l’ensemble des communes de métropole, 41,8% les 5000 communes encore en jeu).
Le fait que la mobilisation s’annonce plus faible qu’au premier tour n’est pas en soi une surprise : c’est une constante que l’on retrouve lors de tous les scrutins municipaux depuis 30 ans. Elle tient notamment au fait que les communes dans lesquelles il y a généralement un second tour sont beaucoup plus grandes que la moyenne (ex : 36% de la population appelée à voter à un second tour réside dans des communes de plus de 100 000 habitants, contre 16% au premier tour), ce qui se traduit « structurellement » par un électorat moins civique/participatif que dans le reste du pays. Le problème vient plutôt de l’ampleur de cette démobilisation électorale qui risque d’affaiblir la légitimité des maires durant leur mandat et plus largement impacter négativement la vie politique locale durant des années.
Quel va être l’impact de la crainte liée au coronavirus dans l’abstention des électeurs encore appelés à voter le 28 Juin ?
C’était déjà la question qui se posait les derniers jours ayant précédé le premier tour… Pour mesurer cet impact, l’Ifop a posé deux questions : une permettant de comparer la crainte liée au Coronavirus par rapport à d’autres motifs d’abstention (ex : désintérêt pour la politique …) . Et une autre, plus précise, permettant de mesurer plus spécifiquement l’impact de l’épidémie sur la décision des abstentionnistes de ne pas aller voter.
Dans les deux cas, l’enquête montre que si le risque d’attraper le Coronavirus en allant voter reste conséquent, il semble moins déterminant qu’au 1er tour.
En effet, si la crainte d’attraper le Covid-19 reste le principal motif d’abstention (35%), devant le sentiment qu’aucune liste ne représente ses idées (32%), ou le mécontentement à l’égard des forces politiques (30%), cette appréhension est beaucoup moins déterminante au 1er tour (55%). Certes, il est difficile de parler « d’évolution » entre les deux tours dans la mesure où les électeurs appelés à voter le 28 juin ne représentent qu’un électeur sur trois (35%) et qu’ils n’ont pas les mêmes caractéristiques démographiques, géographiques et politiques que l’ensemble des électeurs ayant voté le 15 mars. Cependant, dans les strates de l’électorat comparables – comme les villes de plus de 100 000 habitants qui, à six exceptions près, sont toutes concernées par le premier comme par le second tour –, on observe aussi une baisse significative du nombre d’abstentionnistes expliquant leur choix par la crainte du virus (- 27 points).
L’autre indicateur montre quant à lui que de nombreux électeurs (18%) expliquent leur choix de ne pas aller voter exclusivement par les risques d’être affectés par le COVID-19, et 22% à la fois à cause de ce risque et pour d’autres motifs. Au total, l’impact du Coronavirus auprès de l’ensemble des électeurs sur leur participation au scrutin, reste donc conséquent : 40% des électeurs appelés aux urnes déclarent ne pas aller voter à cause des risques liés au COVID-19, soit une proportion similaire à celle observée au premier tour.
Les enjeux liés à la santé (ex : hôpitaux, personnel soignant…) et à la gestion de la crise par les maires sortants vont-ils jouer un rôle déterminant lors du scrutin ?
L’analyse des réponses des électeurs ayant l’intention d’aller voter montre que le vote du second tour ne semble pas déterminé par les questions de santé et par la gestion de la crise par la municipalité sortante. En effet, les déterminants du vote au second tour, restent sensiblement les mêmes que ceux du 1er tour, à savoir des questions de nature financière ou économique (69% pour la gestion des finances, 63% pour la fiscalité, et 58% pour l’emploi), ou relatives à la sécurité (66%) ou encore au cadre de vie (65% pour la propreté, 56% l’urbanisme).
Les questions liées à l’offre de soin ou au service de santé se situent toujours dans le top 5 des facteurs déterminants le vote, mais elles ne sont pas plus élevées chez les électeurs du 2ème tour (61%) que chez les électeurs du 1er tour (62%). Certaines catégories de la population, les plus concernées par l’épidémie, n’en sont pas moins plus sensibles à ces questions de santé, en premier lieu desquels les seniors (73%), les ouvriers (78%), et les dirigeants d’entreprise (69%). On observe également que cette question liée à l’offre de soin et de santé, est plus forte dans les communes moins pourvues en la matière, telles que les communes de moins de 10.000 habitants (68%), ou les banlieues populaires (76%).
La question de la lutte contre le racisme qui a émergé dans le débat public depuis deux semaines, reste quant à elle un élément secondaire du vote des Français ayant l’intention d’aller voter (37% en moyenne), y compris dans les banlieues populaires (38%) dans lequel les minorités ethniques sont généralement surreprésentées.
Vous pouvez télécharger via ce lien l’intégralité du PDF reprenant les chiffres clés de l’enquête.
- Alors que l’abstention a été massive au 1er tour, quelle va être l’ampleur de la mobilisation électorale au second tour des élections municipales fixée au 28 Juin ?
- Quel va être l’impact de la crainte liée au coronavirus dans l’abstention des électeurs encore appelés à voter le 28 Juin ?
- Les enjeux liés à la santé (ex : hôpitaux, personnel soignant…) et à la gestion de la crise par les maires sortants vont-ils jouer un rôle déterminant lors du scrutin ?